Charity Cross

Charity Cross

« Au détour d’un chemin, Charity Cross apparut, comme une ombre fantomatique. Se détachant de la forêt de Blackwolf, l’ancien relais ressemblait à un village un peu biscornu.(…) Charity Cross ressemblait aux villes du Nouveau Monde qui surgissaient du néant tel des champignons, accueillant avec lui, l’espoir d’un monde meilleur. Pourtant la vie y était rude. William se souvenait surtout des enfants. Toujours sales et mal habillés, ils regardaient d’un air méfiant les étrangers. Même les plus jeunes connaissaient l’insécurité. Souvent, le village ne survivait pas aux premiers hivers car les dangers étaient nombreux. La faim triomphait, quand ce n’étaient pas les razzias ou une épidémie qui la devançaient. Il ne restait plus alors que des murs de bois et de la chair à corbeau. Un dernier feu nettoyait tout ça et ce petit monde disparaissait complètement des mémoires. C’est ce qui peinait le plus William. Qui entretiendrait le souvenir de ces pauvres âmes qui s’étaient battues pour survivre ? Le pire était sans doute que dès le lendemain, d’autres hommes recommençaient ailleurs. William les comparait aux graines de blé. Le vent les portait comme il poussait les bateaux, ainsi l’Angleterre ensemençait le Nouveau Monde. Charity Cross lui faisait penser à tout cela. (…)Cependant, William s’était attendu à pire, l’ensemble demeurait propre et solide. William regardait les visages comme autant d’indications : Âges, histoires, tout était dans les stigmates, la forme des mains, le regard. Que faire de tous ces gens ? Une réponse résonnait dans son esprit : l’Amérique. Devant lui, se tenaient les graines du Nouveau Monde. La misère les faisait fuir et en risquant le courroux de Poséidon contre un peu d’espoir, ils embarqueraient et rejoindraient les miséreux de ce continent prometteur. Autre boue, même problème : là-bas, la faim et le froid les attendraient. »